7
Immanence de ton corps. Immanence de ta beauté.
Tu regardes mon regard
comme un miroir qui reflète
le futur. Et le passé.
Je me penche sur ta peau,
braises où sont
entretenus mes rêves.
Je n’ai aimé
que ton désir ;
que ce jour
qui se fait
entre tes mots.
Valse mon cœur,
les valves palpitent.
Au simple toucher
des pépites.
De ta vulve.
Rien ne retient mon souffle
autant que ton haleine.
Sur ma bouche
qui tait.
Je viens de là où le soleil se couche.
Je vais.
Je pars
en ta demeure.
8
Le verre à moitié plein est toujours plein de vie,
le verre à moitié vide est toujours plein de vide.
Je marche comme on aborde,
l’horizon dans la bouche,
le sourire sur la peau.
Les nuits le noir, l’obscur le dur,
tout ce qui fut traversé,
déversé sur
la paille,
j’en ai fait une aire
où mes oiseaux de proie
gîtent
en hiver.
Et quand tangue
ma vie,
je vide mon verre
jusqu’à la lie --
soûl de vigueur --
ivre de vie.
9
Le poids des choses dépend
de l’attraction
et de la force du regard.
C’est ainsi
que tout objet
est sujet de l’attention qu’on lui porte.
Que tout amour
se pèse en fonction
du rapport et des ombres.
Que la nuit
est plus ou moins profonde,
selon qu’elle survient
ou qu’elle tombe.
Que l’essence même de l’être
se fait au prix
de la mort.
Et que la fortune
-- comprenez : la chance –
appartient à celui
qui se lève de bonheur.
Pour les autres :
il suffit de regarder –
pour comprendre.
10
Si je gravis,
ce n’est pas le sommet que je vise
mais son reflet dans le ciel.
La montagne
est une tigresse qui s’étire
pour griffer les nuages.
Je la caresse, la flatte,
la pique si besoin est ;
lui chante des partitions
qui se divisent en pitons, dents,
croupes,
et lignes de crêtes.
Chaque ascension
est étrangère aux autres ;
chaque escalade
défait les certitudes.
Et lorsque survient une avalanche,
il est temps d’écouter
les anciens ;
se souvenir
que le plus dangereux
des ravins…
est en soi-même.
11
Carpe diem quam minimum credula postero[1]. Que la mort s’éloigne de tes principes. Qu’elle ne soit plus qu’un terme dans la parole de vie.
Les ailes du papillon secouent l’instant dans sa fragile éternité.
Tu regardes ; et la fumée s’éloigne du feu qui va s’éteindre.
Tu écoutes ; la musique se dissout dans le vent.
Tu respires ; et les parfums, si volatiles, ont perdu toute essence.
Tu raisonnes ; et les mots vont heurter leurs propres échos.
Là est le souffle. Autour de toi.
Cueille le jour, mon amie, La nuit vient à son heure.
Immanence de ton corps. Immanence de ta beauté.
Tu regardes mon regard
comme un miroir qui reflète
le futur. Et le passé.
Je me penche sur ta peau,
braises où sont
entretenus mes rêves.
Je n’ai aimé
que ton désir ;
que ce jour
qui se fait
entre tes mots.
Valse mon cœur,
les valves palpitent.
Au simple toucher
des pépites.
De ta vulve.
Rien ne retient mon souffle
autant que ton haleine.
Sur ma bouche
qui tait.
Je viens de là où le soleil se couche.
Je vais.
Je pars
en ta demeure.
8
Le verre à moitié plein est toujours plein de vie,
le verre à moitié vide est toujours plein de vide.
Je marche comme on aborde,
l’horizon dans la bouche,
le sourire sur la peau.
Les nuits le noir, l’obscur le dur,
tout ce qui fut traversé,
déversé sur
la paille,
j’en ai fait une aire
où mes oiseaux de proie
gîtent
en hiver.
Et quand tangue
ma vie,
je vide mon verre
jusqu’à la lie --
soûl de vigueur --
ivre de vie.
9
Le poids des choses dépend
de l’attraction
et de la force du regard.
C’est ainsi
que tout objet
est sujet de l’attention qu’on lui porte.
Que tout amour
se pèse en fonction
du rapport et des ombres.
Que la nuit
est plus ou moins profonde,
selon qu’elle survient
ou qu’elle tombe.
Que l’essence même de l’être
se fait au prix
de la mort.
Et que la fortune
-- comprenez : la chance –
appartient à celui
qui se lève de bonheur.
Pour les autres :
il suffit de regarder –
pour comprendre.
10
Si je gravis,
ce n’est pas le sommet que je vise
mais son reflet dans le ciel.
La montagne
est une tigresse qui s’étire
pour griffer les nuages.
Je la caresse, la flatte,
la pique si besoin est ;
lui chante des partitions
qui se divisent en pitons, dents,
croupes,
et lignes de crêtes.
Chaque ascension
est étrangère aux autres ;
chaque escalade
défait les certitudes.
Et lorsque survient une avalanche,
il est temps d’écouter
les anciens ;
se souvenir
que le plus dangereux
des ravins…
est en soi-même.
11
Carpe diem quam minimum credula postero[1]. Que la mort s’éloigne de tes principes. Qu’elle ne soit plus qu’un terme dans la parole de vie.
Les ailes du papillon secouent l’instant dans sa fragile éternité.
Tu regardes ; et la fumée s’éloigne du feu qui va s’éteindre.
Tu écoutes ; la musique se dissout dans le vent.
Tu respires ; et les parfums, si volatiles, ont perdu toute essence.
Tu raisonnes ; et les mots vont heurter leurs propres échos.
Là est le souffle. Autour de toi.
Cueille le jour, mon amie, La nuit vient à son heure.
12
Certains lieux sont comme des quartiers d’orange que l’on goûte avec délice, qui rappellent des tranches de vie. On s’y promène, l’enfance en bandoulière, des amours juvéniles suspendues à la ceinture.
La mémoire elle-même se suspend, le temps de restituer le temps. Et l’on est comme un fruit hâtif qui mûrit à l’ombre du passé.
Si quelqu’un dit la nostalgie, on proteste, le regard sombrant en lui-même. Gemütsstimmung, on proteste. Mélancolie, regrets, spleen, on ne proteste plus : on fuit.
Et plus rien ne nous rattrape, sinon le temps.
13
Sur les ruines construire de nouvelles perspectives, de telle sorte que l’impermanence soit structure et fondation du futur.
C’est avec l’argile que l’on fait du ciment ; à partir de gravillons et de sable, du béton ; avec l’eau ou le vent, de l’électricité…
Ce qui paraît fragile, souvent appartient au groupe des forces immanentes. Le ploiement devient révélateur de l’élan, de la vigueur, de la résistance -- de ce qui tient par le tenace.
Ainsi le muscle est-il constitué de polymères ; mais aussi de cette volonté d’être qui engendre le mouvement.
Ainsi la vie est-elle sursaut ; bonds et cabrioles ; hoquets et quintes ; éternuements.
Spasme. En cet espace.
Incalculable.
14
Ouragan, un cheval trotte sur la plaine.
Des nuages tournoient sur eux-mêmes.
Le vent épouse la crinière vibrionnante,
l’orage frappe du pied sur la terre.
Condensation, chaleur latente.
L’énergie se développe dans le ciel.
Une onde de tempête choque la mer ;
la pluie se cabre, engendrant des torrents.
Vortex et tourbillon de vents.
Pression, et force centrifuge.
La tornade s’en va au galop
avec ses cordes qui serpentent dans l’air.
Le temps, appartient-il au temps ?
La pluie est-elle une glissade ?
Que dire du réchauffement ?
L’Homme a-t-il encore
le temps ?
15
Comme chaque réveil nous porte vers de nouvelles frontières,
chaque parole donne aux lèvres une volupté sonore
et chaque amour revient vers l’initiale beauté.
Un enfant quitte sa terre natale pour parcourir le monde,
pour connaître, et les contes, et les réalités.
Il croise tant d’humains qu’il ne sait les comprendre
dans cette diversité à laquelle ils ressemblent ;
l’enfant se tourne alors vers des vies moins sujettes
au semblable et à l’altérité.
Il demande à voir l’Antilope d’Amérique, le Bison, l’Ara vert,
l’Alligator du Mississipi. Mais aussi la Grue blanche,
la Grèbe esclavon et le Grand polatouche…
On lui répond qu’il est temps qu’il y touche
ne serait-ce que des yeux, à ces espèces en péril,
en voie d’extinction. La nature est farouche ;
mais l’homme est rugueux, et son approche acide ;
trop souvent il brûle la terre et ses contours.
La nature, on le sait, n’est qu’un principe,
mais elle est autre chose que ce qu’elle définit.
Et si l’homme passe sur Terre
oubliant ses préceptes
et commettant l’outrage…
bondissant vers le jour
un enfant crie au vent :
Que
l'élan
soit
sauvage
Daniel LEDUC
---------------------------------------------
[1] Horace. Odes, I, 11, 8 « À Leuconoé ».
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire