vendredi 1 août 2008

GESTES DU JOUR (5)


Les pots de fleurs sur les balcons sont faits pour s’écraser sur les trottoirs. Ceux qui ne répondent à une telle injonction ne méritent pas leur nom ; pas plus qu’ils ne méritent d’être vus, épanouis.
Ainsi vont les choses.
Les lois de la pesanteur et de l’attraction terrestre sont là pour démontrer qu’on ne saurait échapper à la chute – à moins de se soumettre au ballonnement des croyances et autres pétarades.
On ne peut que descendre lorsqu’on domine, les choses sont ainsi. C’est pourquoi le pouvoir est une feuille qui jaunit. Que l’automne attend, sur la terre, fraîchement labourée…

Les bruits de la ville font écho aux bourdonnements de mes pensées.
C’est un flux incessant qui traverse les vitres – comme traverse le sens, par les synapses, par les nerfs tendus vers l’existence.
Les bruits fatiguent et stimulent, essuyant leurs pas sur les tympans.
Des voitures qui vrombissent, aux passants qui coucouannent ; des trains qui chuintent, aux clochers qui blatèrent ; des enfants qui piaillent, aux gens d’armes qui beuglent ; des motos qui craquètent, aux vélos qui pupulent ; du causement des commères, au cacardement des bourgeois ; du couinement des amants, au peupleutement des portables ; du nasillement des racistes, au chicotement des notables ; les bruits fatiguent les structures de la ville ; et celles, gringotantes, de nos pensées sauvages. Les bruits
fatiguent
le temps.
J’écoute…
le silence…
des nuages…

Au plus haut des tours, naissance du vertige.
Des antennes captent
les fourmillements du monde.
Je me relie
aux paroles qui dénouent
.
Des satellites
propagent des secondes
comme s’il s’agissait
de quadriller le temps – que
rien n’échappe, hormis
l’essence
et l’ossature des choses ; que rien
ne se décante,
vraiment.
Les ondes, elles me submergent ;
j’entends échapper à leur champ
.
Au plus haut, sont les étoiles ;
et par delà, l’incoercible
résonance
[ ]

Les gratte-ciel, eux aussi, s’éternisent.
J’empreinte un ascenseur
qui ne monte ni descend :
force de l’immanence
.
Les séquoias géants, eux aussi, grattent le ciel.
Épicéas, Douglas, Araucarias, Eucalyptus
tutoient les sommets
du vivant. Je grimpe
sur des branches
dont les feuilles se noircissent
d’encre
et de volume.
Eux aussi, nous grandissent :
livres,
étendus
sur nos vies –
naines blanches…

Daniel LEDUC

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