lundi 30 juin 2008

MERS (poème)


-- Tu vois là-bas ces lumières qui se posent près du port… ce sont comme des fanaux sur des barques qui tanguent… des vies d’hommes, qui ont tant navigué…
-- Qui ont tant navigué ?
-- Ils ont parcouru des mers aux noms capiteux, comme le sont les vins grecs ou certains vins d’Alsace… la Mer de Marmara, la Mer Ligurienne, la Mer d’Alboran, la Mer des Hébrides, la Mer d’Iroise, la Mer des Sargasses, la Mer de Barents, la Mer de Kara, la Mer de Laptev, la Mer de Wandel, la Mer de Lazarev… celle de Bellinshausen, celle d’Amundsen, celle de Mawson, celle de Weddell, celle de Sornov, celle des Andaman, celle de Laquedives… et la Mer d’Oman, et la Mer de Béring… les Mers de Flores, de Célèbes, de Makassar, de Timor, des Moluques… et celle de Tasman… et celle, imprononçable, d’Okhotsk… et celle, imprononçable, des Tchouktches… Et puis… celles qui n’existent pas…
-- Qui n’existent pas ?
-- Les mers imaginaires ; au fond desquelles vivent des êtres fabuleux ; et dont les côtes sont habitées par des civilisations occultes. Ces mers qui se crayonnent dans l’esprit des hommes, à chaque gorgée de ces vins sirupeux, quand la nuit est aux abois…
-- Aux abois ?
-- Ne cherche pas, mon gars ; la nuit est aux abois. Tu vois là-bas ces lumières qui se posent… elles viennent à la rencontre du jour qui va naître… ce sont des paroles d’hommes enfouies dans des décombres, par delà toutes les mers… des cris surgissant des abysses… un appel à la vie… Ce sont tes mères, toutes tes mères, ces lumières qui clignotent…
-- Mes mères ?

Daniel LEDUC


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